Conseil de discipline – Décision 30-18-01934 – Illégalement verser des avantages – prélèvement sanguin et marchandise

No dossier30-18-01934
Date de Jugement2019-01-23
No dossier antérieurn/a
Date Jugement dossier antérieurn/a
JuridictionProvincial
TribunalConseil de Discipline – Ordre des Pharmaciens du Québec
Plaignant / DemandeurN.L., en sa qualité de syndic adjoint de l’Ordre des pharmaciens du Québec
Intimé / DéfendeurJ.F.L., pharmacien
Mise en causen/a
Type de pratique pharmaceutiqueCommunautaire
Chefs d’accusation /nature du recours (articles) [Sanction/ sentence/ condamnation/ ordonnance]      (1) «Entre le ou vers le 1er juin 2016 et le ou vers le 31 juillet 2016, (…), a illégalement versé au centre de traitement pour alcooliques et toxicomanes Pavillon Louis-Cyr un avantage relatif à l’exercice de la profession en remettant gratuitement de la marchandise, dont des produits d’hygiène personnelle, et des médicaments dont certains sont inscrits à l’annexe 3 du Règlement sur les conditions et modalités de vente des médicaments (RLRQ, c. P-10, r. 12), contrevenant ainsi à l’article 50 du Code de déontologie des pharmaciens (RLRQ, c. P-10, r. 7)». [4] [Amende 3000$]

(2) «Entre le ou vers le 1er mars 2015 et le ou vers le 24 février 2017, a illégalement versé un avantage relatif à l’exercice de la profession en offrant un service gratuit de prélèvement sanguin à domicile à différents patients demeurant dans les résidences suivantes (…) contrevenant ainsi à l’article 50 du Code de déontologie des pharmaciens (RLRQ, c. P-10, r. 7)». [4] [Amende 6000$]  
Résumé      Élément déclencheur :
«Le 3 mai 2016, la plaignante reçoit une demande d’enquête provenant d’un autre pharmacien. La directrice du Pavillon Louis Cyr, centre de traitement pour alcooliques et toxicomanes l’informe qu’elle transfère les résidents de pharmacie, soit à la pharmacie de l’intimé située à Sainte-Julienne». [10]      

Faits :
«L’intimé est inscrit au Tableau de l’Ordre depuis 2008». [8]
«Il est propriétaire de trois pharmacies». [9]
«Les raisons de ce changement de pharmacien ne sont pas reliées à une insatisfaction professionnelle, mais plutôt au fait que l’intimé « lui donne ce dont elle a besoin »». [11]
«Le 3 mai 2016, l’intimé signe un contrat de service avec la directrice générale du Pavillon Louis Cyr afin de desservir la médication de la clientèle pour la durée de leur thérapie et d’assurer un suivi de la thérapie médicamenteuse». [12]
«Entre le 1er juin et le 31 juillet 2016, l’intimé remet au Pavillon Louis Cyr de la marchandise telle que des produits hygiéniques et des médicaments inscrits à l’annexe 3 du Règlement sur les conditions et modalités de vente des médicaments, notamment de l’acétaminophène valeur de 223,22 $, puis, une deuxième fois pour une valeur de 237,37 $, sans en réclamer le paiement». [13]
«Lors d’une conversation téléphonique avec la propriétaire de la résidence, celle-ci a confirmé qu’elle changeait de pharmacie et transférait les dossiers de ses résidents à la pharmacie de l’intimé, non pas pour insatisfaction professionnelle, mais parce que l’intimé «lui offre quelque chose de tellement gros qu’elle ne peut refuser »». [16]
«La plaignante a eu la confirmation que tous les résidents, à l’exception de celui ayant dénoncé la situation, ont transféré leurs dossiers à la pharmacie de l’intimé». [17]
«Dans ses trois pharmacies, l’intimé offre des services de prélèvements sanguins aux patients qui s’y présentent et réclame des frais de 20 $ pour ce service». [19]
«Par l’intermédiaire de ses trois pharmacies, l’intimé dessert les six résidences pour personnes âgées mentionnées au chef 2 de la plainte. Afin de les conquérir et de les fidéliser, l’intimé offre aux résidences un service de prélèvements à domicile». [20]
«Depuis le 1er mars 2015, il engage une infirmière auxiliaire qui se déplace pour effectuer des prélèvements sanguins, faire la prise de la tension artérielle et de la glycémie. Elle se présente dans chacune des résidences environ une heure chaque semaine. Les résidents n’ont plus à prévoir un déplacement à l’extérieur pour obtenir ce service». [21]
«Aucuns frais ne sont réclamés au patient». [22]
«L’intimé assume entièrement les frais de cette infirmière auxiliaire, tels que le taux horaire, le kilométrage, la fourniture et assume même les frais réclamés par les services de laboratoire hospitalier qui sont de 5 $ par patient». [23]
«Entre le 1er mars 2015 et le 24 février 2017, l’intimé a avantagé l’ensemble des patients de ces 6 résidences de plus de 2 000 $ pour les services de prélèvements, sans compter les frais des services de laboratoire que le Conseil a estimé à environ 800 $». [25]
«Les relations professionnelles doivent se développer sur les qualités, les compétences, le respect des obligations déontologiques du pharmacien et non sur ce qu’il peut donner ou « acheter » en échange d’une fidélisation». [38]
«De plus, le pharmacien doit respecter le droit du patient de faire affaire avec le pharmacien de son choix et ne pas faire de pression indue en sa faveur. La situation vécue par les résidents de la résidence La Roseraie démontre le contraire». [42]
«Les infractions ne sont pas isolées, l’intimé ayant fait l’objet de deux demandes d’enquêtes sur une période de six mois dénonçant les mêmes reproches». [44]
«Il a plus de 10 ans d’expérience et devait connaître ses obligations déontologiques». [48]
«Il n’a pas d’antécédents disciplinaires». [53]
«Il a modifié sa pratique auprès des résidences pour personnes âgées et depuis l’enquête de la plaignante, il réclame aux patients des frais de 20 $ pour les prélèvements sanguins». [54]  

Décision :
«Après s’être assuré auprès de l’intimé que son plaidoyer est libre et volontaire, et qu’il comprend que le Conseil n’est pas lié par les recommandations conjointes sur sanction, le Conseil le déclare coupable, séance tenante, des infractions sur les deux chefs de la plainte, tel que décrit au dispositif de la présente décision». [3]
«Les parties recommandent conjointement au Conseil d’imposer à l’intimé une amende de 3000 $ sur le chef 1, une amende de 6000 $ sur le chef 2, et de condamner l’intimé au paiement des déboursés». [5]
«L’intimé a reconnu sa culpabilité sur les deux chefs de la plainte. En tenant compte que les parties ont présenté une recommandation conjointe sur sanction, le Conseil doit maintenant déterminer la sanction à imposer sur chacun des chefs, laquelle doit dissuader le professionnel de récidiver, tout en servant d’exemple à l’égard des autres membres de la profession qui pourraient être tentés de poser des gestes semblables, et prendre en considération le droit du professionnel d’exercer sa profession». [26]
«Par son plaidoyer, l’intimé a reconnu sa culpabilité sur les chefs 1 et 2 envers l’article 50 du Code de déontologie des pharmaciens (…)». [30]
«Considérant l’ensemble des circonstances de la présente affaire, le Conseil est d’avis que les sanctions, suggérées d’un commun accord par les parties, ne sont pas déraisonnables, ne déconsidèrent pas l’administration de la justice et ne sont pas contraires à l’intérêt public». [69]
«Par ces sanctions, totalisant 9 000 $, le Conseil considère que les objectifs de dissuasion pour le professionnel, l’exemplarité pour les membres de la profession et la protection du public sont atteints conformément aux enseignements de Pigeon c. Daigneault». [70]  
DécisionCoupable – 2/2 chefs – Amende 9000$
Éléments d’intérêt pour le pharmacien/la pharmacieSelon le Code de déontologie, le pharmacien ne doit accepter aucun avantage relatif à l’exercice de la pharmacie, en plus de la rémunération à laquelle il a droit. Il peut toutefois accepter un remerciement d’usage ou un cadeau de valeur modeste. De même, il ne doit verser, offrir de verser ou s’engager à verser à quiconque tout avantage relatif à l’exercice de sa profession. Dans ce cas, l’intimé a versé des avantages relatifs à l’exercice de la profession afin de s’approprier une clientèle vulnérable pour en retirer un bénéfice, au détriment des autres pharmaciens. Il n’a donc pas respecté la libre concurrence entre les pharmaciens.
Mots-clésAvantages, foyer de soins, marchandise, prélèvement sanguin, Code de déontologie
JurisprudencePharmaciens (Ordre professionnel des) c. Fortier, 2017 CanLII 35568 (QC CDOPQ); Pharmaciens (Ordre professionnel des) c. Drouin, 2017 CanLII 19465 (QC CDOPQ); Pharmaciens (Ordre professionnel des) c. Ratté, supra, note 5; Pharmaciens (Ordre professionnel des) c. Panoyan, 2015 CanLII 78622 (QC CDOPQ); Pharmaciens (Ordre professionnel des) c. Haddad jr, 2015 CanLII 33205 (QC CDOPQ); Pharmaciens (Ordre professionnel des) c. Dannel, 2012 CanLII 39721 (QC CDOPQ); Pharmaciens (Ordre professionnel des) c. Monarque, 2018 CanLII 33492 (QC CDOPQ); Pharmaciens (Ordre professionnel des) c. Koutsouris, 2018 CanLII 4929 (QC CDOPQ)  
Référencehttps://www.canlii.org/fr/qc/qccdopq/doc/2019/2019canlii9417/2019canlii9417.pdf
AuteurJonathan Couture
RévisionJean-François Bussières
Révision et mise en formeJean-François Bussières

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