No dossier | 410-17-001143-135 |
Date de Jugement | 2016-03-24 |
No dossier antérieur | n/a |
Date Jugement dossier antérieur | n/a |
Juridiction | Provincial |
Tribunal | Cour supérieure |
Plaignant /
Demandeur |
Pharmacie J.-B. inc. (Pharmacie B.), Shawi pharma inc. et J.-S.B. (pharmacien propriétaire)
«Précisons que Shawi pharma, est la partie « commerciale » de l’entreprise et Pharmacie B. exploite la partie « officine ». ». [7] |
Intimé / Défendeur | Pharmacie E.B. et A.V. inc.*, Phabervin inc.* et J.L.**
*«Précisons que Pharmacie E.B. et A.V inc. exploite la partie « officine » de l’entreprise et Phabervin inc. la partie « commerciale ». [13] |
Mise en cause | nil |
Type de pratique pharmaceutique | Communautaire |
Chefs d’accusation /nature du recours
(articles) [Sanction/ sentence/ condamnation/ ordonnance]
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«Le Tribunal est saisi d’une demande ayant pour but l’obtention de dommages-intérêts compensatoires pour pertes de revenus, troubles et inconvénients subis à la suite d’actes fautifs des défendeurs ainsi que pour atteinte à la réputation suite au départ de leur employé J.L. pour les codéfendeurs.». [1] (Art. 2088 et 2091 Code civil du Québec) [Versement de 12 000$ par J.L. aux demandeurs] |
Résumé | Faits : «Le demandeur, J.-S.B. (B.) est pharmacien depuis 2001. Pendant ses études pour l’obtention de son diplôme, il travaille au sein de la Pharmacie F.L. (…), entreprise opérée par M. F.L. depuis la fin des années 1950.». [2] «En 2004, après avoir complété sa formation et travaillé pendant quelque temps dans la région de Québec, B. devient propriétaire avec d’autres partenaires de la Pharmacie (…)». [3] «En 2012, B. fait l’acquisition des parts de M. . Il est le seul actionnaire de la pharmacie J.-S. B. inc. (Pharmacie B.) et Shawi pharma inc. (Shawi pharma) (…)». [6] «En 2004, au moment de la vente de la pharmacie (…), J.L. (L.), fils du propriétaire fondateur, F.L., travaille au sein de l’entreprise. Il y débute vers 1970 à temps partiel et en 1991 il quitte son emploi auprès de Revenu Canada pour y travailler à temps complet». [8] «L. connaît très bien l’entreprise, puisqu’il y a occupé divers postes de travail. Il occupe au moment de son départ, en août 2012 et ce, depuis plusieurs années, le poste de technicien en laboratoire». [9] «L. est très proche et disponible pour la clientèle. Il tisse au fil des ans des liens avec les clients à un point tel que certains s’adressent à lui personnellement pour obtenir réponse à leurs besoins et ce, malgré qu’il n’ait pas la formation de pharmacien. Cette approche client est d’ailleurs appréciée de ses employeurs». [10] «Au fil du temps, divers changements surviennent au sein de la Pharmacie B., tels que déménagement, arrivée de nouveaux propriétaires, etc. Cependant, aucun n’a d’effets notables sur l’achalandage. Certes, il y a un certain mouvement de la clientèle, situation normale dans ce genre de commerce, la plupart du temps relié à des déménagements ou décès de clients, mais rien de significatif». [14] «L. «a décidé du jour au lendemain d’abandonner ce travail. Sa démission verbale remise à un autre employé au lieu de l’employeur prenait effet le jour même. ». [62] «Le 13 août 2012, il avise l’adjointe administrative de la Pharmacie B., J.J., de son absence du travail. Il communique avec A.V. (V.), de la Pharmacie B.V. pour lui offrir ses services.». [21] «Avec son expérience, L. peut effectuer des tâches déléguées. Il est convenu qu’il doit débuter son nouvel emploi le 20 août 2012. Lors de cette rencontre, il est discuté rapidement des conditions d’emploi de L., soit salaire et vacances sans plus. En fait, on maintient les acquis de L. au niveau des conditions de travail. Alors qu’un technicien de laboratoire gagne environ 30 000 $ par année, on accepte de verser à L. un salaire d’environ 72 000 $ annuellement». [24] «B. tente sans succès de le joindre lorsqu’il apprend cette démission. Il est très surpris d’autant plus que quelques semaines auparavant, il avait questionné L. sur ses intentions professionnelles. Ce dernier l’aurait alors rassuré en affirmant qu’il n’envisageait la retraite que dans deux ans, soit en même temps que sa conjointe.». [29] «Rapidement, les clients de son ancien employeur, Pharmacie B. affluent chez son nouvel employeur Pharmacie B.V.». [32] «On parle ici d’une vraie migration. Près de 280 clients ont demandé le transfert de leur dossier ou ont simplement déposé leurs nouvelles ordonnances chez Pharmacie B.V.». [33] «Devant l’ampleur de ces transferts, les demandeurs tiennent les défendeurs responsables des pertes encourues, d’où le présent litige.». [37] «Les demandeurs prétendent que la faute des défendeurs est apparente, sans équivoque et grossière. Ils soutiennent qu’à la suite de la démission de L., des actes de sollicitation et de concurrence déloyale sont posés, et ce, à l’aide de renseignements confidentiels connus par L.». [40] «De leur côté, les défendeurs nient avoir utilisé des renseignements confidentiels, sollicité la clientèle ou avoir posé des gestes déloyaux ou fait du dénigrement.». [45] «Ils soutiennent que les patients ont le libre choix du pharmacien avec qui ils veulent faire affaire. D’ailleurs, la plupart des patients ayant demandé le transfert de leur dossier vers Pharmacie B.V. ont confirmé à B. quitter la Pharmacie B. pour pouvoir suivre L.». [47] «Les demandeurs soutiennent que les défendeurs, Pharmacie B.V. et Phabervin inc sont responsables des dommages occasionnés puisqu’ils ont grandement bénéficié des actions de L. Les demandeurs ajoutent que les conséquences qui découlent de la démission intempestive de L. étaient envisagées et souhaitées, ce qui engage leur responsabilité». [44] Concernant l’article 2091 du Code civil du Québec Article 2091 du Code civil du Québec : «Chacune des parties à un contrat à durée indéterminée peut y mettre fin en donnant à l’autre un délai de congé. Le délai de congé doit être raisonnable et tenir compte, notamment, de la nature de l’emploi, des circonstances particulières dans lesquelles il s’exerce et de la durée de la prestation de travail». «Dans le cas sous étude, aucun contrat de travail ne liait Pharmacie B. et L. (…)». [51] «En l’absence d’un contrat de travail, ce sont les dispositions du Code civil du Québec qui s’appliquent». [52] «Force est de constater que le départ de L. a entraîné un bouleversement important chez les demandeurs. Dans une situation où ils n’ont pu planifier son départ alors qu’il quitte pour un compétiteur, les demandeurs n’ont pas été en mesure de prendre des moyens pour tenter de limiter les dommages». [69] «Même si une telle démarche n’avait pas évité l’exode massif vécu, cela n’élimine pas le droit de l’employeur à ce délai de congé». [70] «Les demandeurs requièrent un délai de congé de 6 mois. À la lumière de l’ensemble des faits, la durée de la prestation de travail de L., son importance dans l’entreprise, le salaire qui lui était versé et les conditions de travail octroyées ainsi que les circonstances de son départ, le délai de congé sera fixé à deux mois. Ceci représente un montant de 12 000 $5 que L. devra verser aux demandeurs à titre de dommage-intérêts pour ne pas avoir donné de délai de congé conformément à la Loi». [73]Concernant l’article 2088 du code civil du Québec Article 2088 du Code civil du Québec : «Le salarié, outre qu’il est tenu d’exécuter son travail avec prudence et diligence, doit agir avec loyauté et ne pas faire usage de l’information à caractère confidentiel qu’il obtient dans l’exécution ou à l’occasion de son travail. Ces obligations survivent pendant un délai raisonnable après cessation du contrat, et survivent en tout temps lorsque l’information réfère à la réputation et à la vie privée d’autrui».«C’est à l’employeur qu’incombe le fardeau de la preuve, soit de démontrer la contravention du salarié.». [75] «Il doit démontrer qu’il y a eu utilisation de renseignements confidentiels ou autre manoeuvre déloyale soit par dénigrement, fausses représentations ou tromperies auprès des clients.». [76] «En ce qui a trait à l’utilisation de renseignements confidentiels, L. précise ne pas être à l’aise avec l’équipement informatique, il est tout au plus capable de sortir une liste de clients si nécessaire. Ce qu’il affirme n’avoir fait à aucun moment». [80] «Cependant, il a démontré une connaissance personnelle des clients qu’il a servis pendant des années. B. a d’ailleurs confirmé la mémoire phénoménale de L. quant aux particularités de chaque client, par exemple la rue où chacun habite, sans plus». [81] «B. soutient que L. fait de la sollicitation auprès de sa clientèle et qu’il a informé des clients de son départ vers la Pharmacie B.V.». [83] «L’utilisation d’une liste de clients ou la sollicitation ne sont pas en soi des gestes contraires au devoir de loyauté (…)». [84] «La jurisprudence nous enseigne que : « La sollicitation de clients ne constitue pas un manquement à l’obligation de loyauté puisqu’elle représente un acte de concurrence ordinaire, la recherche de clientèle étant l’élément décisionnel de la concurrence.» ». [85] «En somme, il ne ressort aucun élément permettant de croire que L. s’est livré à du dénigrement, des fausses représentations ou des tromperies auprès des clients de la Pharmacie B.». [99] Décision : |
Décision | Versement de 12 000$ par J.L. aux demandeurs |
Éléments d’intérêt pour le pharmacien/la pharmacie | Un pharmacien propriétaire se doit d’être prudent lors de l’établissement d’un contrat avec un employé. Dans le cas présent, L. était un employé qui avait un rôle central dans la pharmacie. Son départ vers une pharmacie concurrente risquait de provoquer des pertes de clientèle. Ce fait était prévisible. L’établissement d’un contrat avec une clause de non-concurrence aurait pu être utile dans le cas présent. «Les demandeurs ont eu tout le loisir d’établir un contrat de travail avec L. afin de préciser les obligations et ils auraient pu exiger une clause de non-concurrence pour pallier à l’éventualité où ce dernier serait tenté d’aller travailler chez un compétiteur. ». [111] |
Mots-clés | Loyauté, Clientèle, Délai de congé |
Jurisprudence | Poirier c. Charron, (1995) R.J.Q 1197 Bélisle inc c. Lyrco Nutrition inc. 2007, QCCA 676 Excelsior c. La Mutuelle du Canada, 1992 CanLII 3559 (QC CA), [1992] R.J.Q. 2666 (C.A.) |
Référence | 2016 QCCS 1306 (CanLII) (http://www.canlii.org/fr/qc/qccs/doc/2016/2016qccs1306/2016qccs1306.pdf) |
Auteur | Monica Rodrigues |
Révision | Jean-François Bussières |
Révision et mise en forme | Jean-François Bussières |
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